Iris Ait Ouadda

Qu’est ce que le pouvoir d’agir ?

 

« Faire pour les gens sans eux, c’est le faire contre eux »

 

« Le pouvoir d’agir désigne, au sens large, la capacité pour les personnes de maîtriser ce qui est important pour elles, leurs proches, la collectivité à laquelle elles s’identifient » Yann Le Bossé

 

Issu du terme anglosaxon d’empowerment, il n’existe pas de traduction française permettant d’évoquer l’ensemble des dimensions de l’empowerment ; on peut parler de capacitation, puissance d’agir, ou pouvoir d’action, mais la plus satisfaisante semble être celle de « pouvoir d’agir ». Yann Le Bossé a traduit la notion d’empowerment par Pouvoir d’agir, puis l’ont complétée pour obtenir le Développement du pouvoir d’agir des personnes et des collectivités (DPA PC). Cette terminologie constitue une approche spécifique de l’empowerment.

 

Elle permet de souligner 4 éléments intrinsèques à la notion :

La question du pouvoir : pour les auteurs, le terme « vise ici cette nécessité de réunir les ressources individuelles et collectives à l’accomplissement de l’action envisagée ». Le pouvoir est considéré comme une « ouverture des possibles ». Ce type de pouvoir est un pouvoir sur les choses qu’il faut distinguer du pouvoir sur autrui ou du pouvoir sur soi.

 

Le terme anglophone empowerment inclut deux dimensions :

  • la notion de pouvoir
  • le processus d’apprentissage pour y accéder.

 

Il s’agit donc à la fois d’un état : « je suis renforcé dans mon pouvoir, ma capacité à faire… » et d’un processus « je suis en cours d’être renforcé dans mon pouvoir » qui peut être individuel « je suis renforcé » ou collectif « mon groupe, ma famille, les habitants de mon quartier, mon équipe de travail sont renforcés ».

 

 

Dans la vie citoyenne, le pouvoir d’agir désigne la possibilité pour les citoyens et citoyennes d’être acteurs et actrices  des transformations de la société c’est-à-dire :

  • la possibilité de comprendre les systèmes en place, le fonctionnement de la démocratie, les questions sociales (leurs causes, conséquences, leviers qu’on peut activer pour transformer les choses, etc), autrement appelée conscientisation ;
  • la possibilité de s’organiser pour mettre en place des actions en réponse aux problèmes et priorités qu’ils identifient, autrement appelée auto-organisation ;
  • la possibilité de peser sur les décisions et politiques publiques qui les concernent, autrement appelée influence ou capacité de négociation.

 

 

Ainsi, le développement du pouvoir d’agir des personnes visent trois niveaux d’objectifs :

  • A l’échelle individuelle (de la personne) : favoriser son autonomie, son bien-être (acquisition d’une image positive de soi, acquisition de compétences pour porter un regard critique et développer des stratégies),
  • A l’échelle sociale, d’un groupe de personnes (association, quartier…) : développer sa capacité d’agir « avec » et d’« agir sur »,
  • A une échelle politique, plus globale : modifier l’organisation jusqu’à une transformation de la société vers plus de justice sociale.

 

 

Pour accéder à cela, il est nécessaire d’agir sur les obstacles d’ordre personnel mais aussi d’ordre structurel. On vise l’affranchissement (s’affranchir des obstacles) et non plus l’adaptation (aux obstacles). Le pouvoir d’agir ne doit pas se transformer en devoir d’agir. Ce pouvoir d’agir se distingue également du simple passage à l’action. Il ne s’agit pas simplement de devenir plus actif, comme si la passivité ou l’apathie constituait le problème à résoudre.

Le terme développement souligne que le pouvoir d’agir n’est pas seulement un résultat, mais aussi un processus qui consiste à réunir les ressources nécessaires à l’atteinte d’un objectif;

L’intervention peut concerner aussi bien des personnes que des groupes ou collectifs de personnes.

 

 

Yann Le Bossé est titulaire d’un doctorat en psychologie. Il travaille depuis 30 ans à l’approfondissement des connaissances relatives au développement du pouvoir d’agir (DPA) des personnes et des collectivités. Ses travaux de recherche portent simultanément sur les aspects théoriques, empiriques et pratiques du DPA. À ce titre, il est à l’origine de la mise au point d’une nouvelle approche d’intervention sociale et éducative.